Saint Thomas d'Aquin
Au XIIIe siècle, la personnalité de saint Thomas d'Aquin (1225-1274) domine la philosophie. Refusant la doctrine augustinienne de l'illumination divine, le «Docteur angélique» puise dans Aristote les moyens de concilier la raison et la foi afin de constituer la théologie comme science. En regard de l'augustinisme, seul souverain jusqu'au XIIe siècle, le thomisme prendra bientôt corps dans le monde catholique comme une réplique de la logique d'Aristote aux dialogues de Platon.
Le Moyen Age philosophique se clôt sur la publication de la Docta Ignorantia de Nicolas de Cues (1401-1464), de la Theologia platonica de Marsile Ficin (1433-1499), et sur la montée au bûcher (en 1415) de Jan Hus, qui avait traduit l'Evangile en tchèque et prêché la réforme de l'Eglise catholique. Désormais vont apparaître les grands humanistes et les réformateurs du XVI e siècle, qui reprocheront aux philosophes du Moyen Age d'avoir cédé le terrain au paganisme (Erasme) ou d'avoir livré les clés de la théologie à la morale grecque (Luther). En fait, la philosophie médiévale se traduit par la laïcisation de la théologie.
Fils du comte Landulphe d'Aquino et de la comtesse Théodora d'Inverno, d'origine normande, Thomas naît en 1224/1225 au château de Roccasecca, dans le Royaume des Deux-Siciles. La famille d'Aquin est une grande famille d'Italie, partisane du parti pontifical.
De 1230/1231 à 1239, il est oblat à l’abbaye bénédictine du Mont-Cassin. Il y demeure neuf ans, durant lesquels il apprend à lire et à écrire, ainsi que les rudiments de la grammaire et du latin, associés à une formation religieuse élémentaire.
À partir de 1239, Frédéric II, en lutte contre Grégoire IX[3], expulse les moines de l'abbaye. Sur le conseil de l'abbé, les parents de Thomas l'avaient déjà envoyé à Naples pour y poursuivre ses études au Studium regni (qui n'est pas une université, mais une académie locale), fondé par Frédéric II en 1220. Il y étudie alors auprès des maîtres les disciplines classiques du Trivium et du Quadrivium ; il découvre sans doute alors Aristote à travers Averroès dont les traductions latines commencent à circuler. C'est alors qu'il rencontre des frères prêcheurs dont la vie et la vitalité apostolique l'attirent.
Son père meurt le 24 décembre 1243, rendant le jeune Thomas un peu plus libre de son destin. Il décide d'entrer dans l’ordre des dominicains en avril 1244, à l'âge de vingt ans, contre l’avis de sa famille qui veut en faire l'abbé du Mont-Cassin. Sa mère le fait alors enlever et l’assigne à résidence à Roccasecca où il demeure un an. Thomas ne changeant cependant pas d’avis, sa famille finit par accepter son choix[